Marketing Book of the Month : « Rebel Rebel » montre la voie vers un monde numérique plus percutant
« Rebel Rebel » de Geert Van Mol, ancien Chief Digital Officer chez Belfius et premier lauréat du titre de CDO of the Year, n’est pas un livre comme les autres. Et l’on peut en dire autant de sa présentation au Cirque d’hiver à Gand, qui a attiré le gratin du monde digital. Quelques marketeurs chevronnés ont aussi répondu à l’invitation alléchante d’explorer les liens entre transformation numérique et musique. Voilà ce que deux d’entre eux ont retenu de l’ouvrage et de sa présentation hors norme.
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Jamais la présentation d’un nouveau livre n’aura été aussi rock’n’roll. Geert Van Mol – qui dirige désormais l’agence de promotion immobilière Steenoven – avait même prévu une première partie passionnante, réunissant Peter Saerens, Peter Hinssen, Tom De Ridder et Jimmy De Wit dans le rôle d’animateur. Sans oublier l’intermède musical très rythmé par le batteur Michael Schack. |
L’auteur lui-même a présenté son livre et son modèle de « pensée musicale numérique » avec beaucoup de passion et de sens du spectacle. Les métaphores musicales, qui constituent le fil conducteur du livre, ont refait surface dans différentes chansons et vidéos au cours de la présentation.
Quelque trois cents personnes avaient réservé leur place au Cirque d’hiver pour assister à cet événement exceptionnel. Parmi eux figuraient Francis Lippens (CEO d'AKQA Brussels) et Karel Vinck (CEO de Finch Collective). Nous avons recueilli leur avis sur « Rebel Rebel » au terme de la présentation.
Un état d’esprit
Tout d’abord, quelles sont selon eux les leçons que les marketeurs peuvent ou doivent tirer de « Rebel Rebel » ? « Pour moi, la principale leçon est que toute entreprise ou organisation doit oser donner la parole aux rebelles dans ses rangs », indique Francis Lippens. « On ne doit pas chercher à les marginaliser, mais au contraire leur donner un porte-voix, car ce sont eux qui font bouger les lignes et suscitent les innovations. »
Karel Vinck retire pour sa part deux grands enseignements de la lecture du livre : « Beaucoup ne font toujours pas la distinction entre digital et IT. Or, Geert considère le digital avant tout comme un état d’esprit qui permet de créer des ponts entre les expériences online et offline. Il nous propose un véritable guide pour améliorer l’expérience client dans son ensemble. Un deuxième enseignement est qu’il n’est pas toujours nécessaire de réinventer la roue. Par exemple, Itsme fonctionne très bien, alors pourquoi vouloir lancer une variante ? »
Une expérience de marque cohérente
Aujourd’hui, la transformation numérique semble aller de soi, surtout dans le marketing. Pourtant, nous sommes encore loin du compte, à en croire Karel : « Tout comme le traitement des données, la numérisation est encore trop souvent considérée comme un processus distinct. Dans de nombreuses entreprises, le marketing digital et le marketing de marque sont encore deux activités séparées. » Et ce, alors qu’une vision holistique permet d’aller beaucoup plus loin, comme en témoigne la belle réussite de Van Mol dans le secteur bancaire. « En décidant très tôt de faire dépendre le digital de la communication et non de l’IT, Belfius a été capable de mener de nombreux projets innovants. »
Dans le droit fil du lien entre expériences numériques et physiques évoqué par Karel, Francis souligne qu’il n’y a plus aujourd’hui de distinction entre numérique et analogique, entre en ligne et hors ligne. « Dans les campagnes et les expériences clients, on veille aujourd’hui à ce que tout s’imbrique de la manière la plus fluide et homogène possible. »
Geert Van Mol a cité l’exemple de Schoenen Torfs. Cette société a mis sur pied une boutique en ligne performante, mais a aussi installé des écrans dans ses magasins, afin de garantir le meilleur équilibre entre physique et virtuel. « C’est l’objectif ultime de toute marque », considère Francis. « Tout le monde en est conscient, mais l’impact sur tous les échelons de l’entreprise rend la chose peu évidente. » Karel abonde dans le même sens : « On ne peut quand même pas orchestrer d’un côté des campagnes très humaines et proposer de l’autre un site web impersonnel, car c’est comme immerger les clients dans deux mondes différents. Malheureusement, ce problème touche de nombreuses entreprises. Développer une expérience de marque cohérente est un exercice très ingrat. »
Le client est roi
La plupart des sujets abordés par Geert Van Mol dans son livre – de l’optimisation d’une application à la mise en place d’une boutique en ligne attrayante – se résument au fond à une seule consigne : tenir compte des besoins et attentes du client, sans compliquer inutilement les choses. « Le problème n’est pas tant que l’on néglige de se centrer sur le client ; non, c’est plutôt l’incapacité à faire la différence entre simplicité et simplisme », souligne Francis. « À force de vouloir tout simplifier, on finit par ne plus faire simple. » Le principe est… simple : « Évitez de faire compliqué quand cela ne s’impose pas. »
François s’insurge contre ce qu’il appelle le nombrilisme : « On peut s’enthousiasmer devant la beauté esthétique et l’efficacité technique d’une interface. Mais ce qui compte avant tout, c’est l’expérience du client. » Tout à fait d’accord, Karel préconise une orientation client basée sur les besoins réels. « Je ne crois pas aux personas, qui par définition n’existent pas dans la réalité. Je regrette que la plupart des parcours clients soient encore basés là-dessus, car cette approche complique a réalisation de nombreux projets digitaux. »
Un terrain propice aux coopérations
L’auteur de « Rebel Rebel » n’attache pas seulement une grande importance à la création d’équipes compétentes aux ambitions partagées – où la somme des parties, comme chez les Beatles, conduit à des résultats sans précédent – mais plaide aussi en faveur de la cocréation à l’échelle de l’entreprise. C’est là une condition essentielle à l’élaboration d’une bonne stratégie numérique et un antidote à la culture du travail en vases clos. Sur ce plan, Francis estime que des améliorations sont encore possibles : « Ici aussi, la plupart des gens sont conscients de l’importance de collaborer entre départements pour obtenir de meilleurs résultats, mais ils ne savent pas comment s’y prendre, étant donné les différences de KPI et de budgets entre les services. »
« Le leadership doit créer un terrain propice à ces collaborations » estime Francis, soulignant ainsi la responsabilité des dirigeants en la matière. Même son de cloche chez Karel : « Le terme "hiérarchie" est ici crucial. S’il faut soumettre chacune de ses idées au patron, on n’avance pas. C’est pourquoi Geert conseille aux entreprises d’adopter le mode d’organisation des start-ups, avec des équipes réduites et autonomes qui peuvent rapidement aboutir à des innovations utiles. »
Rock on
Le climat d’entente cordiale qui existe souvent entre les artistes a également inspiré Geert Van Mol. Ainsi, il a plusieurs fois recommandé de s’appuyer sur les bonnes idées de la concurrence – sans chercher à réinventer la roue à chaque fois, résume Karel Vinck. On franchit un pas de plus en mettant en œuvre des partenariats efficaces entre acteurs du même secteur, pour échanger des idées et accompagner de concert un client. Est-ce déjà le cas dans le marketing ? « Pour certains clients, nous collaborons avec d’autres agences au sein d’un écosystème, où nous traçons ensemble les grandes lignes, après quoi chacun assume ses responsabilités », explique Francis. « Il y a encore des progrès à faire dans ce domaine, mais on n’en est certainement plus au chacun pour soi. »
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Le mot de la fin est pour le rebel with a cause Geert Van Mol : « Rock on, babies ! » C’est avec ses mots qu’il a clôturé sa formidable présentation au Cirque d’hiver, évidemment sur la musique de Rebel Rebel de David Bowie... |
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