Trois questions sur le noble purpose à Olivier Onghena - 't Hooft

Fin de l’année dernière, Olivier Onghena - 't Hooft publiait « The Book of Noble Purpose » en anglais et en néerlandais. La traduction française paraîtra fin février sous le titre « Le Livre du Noble Purpose ». Notre passion pour le meaningul marketing nous a donné envie d’en savoir plus. C’est pourquoi nous avons posé trois questions à l’auteur.

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Une petite remarque préliminaire : un entretien avec Olivier Onghena - 't Hooft est impossible à résumer en un article, et encore moins en trois questions… Cet ancien directeur marketing de Belgacom notamment est un véritable moulin à paroles, surtout lorsqu’il s’agit d’un thème qui lui tient à ce point à cœur. Si c’est une gageure de vouloir synthétiser 300 pages en trois questions, nous avons quand même voulu tenter l’expérience. Histoire de vous donner envie, à vous aussi, de lire cet ouvrage…

Premier question : mission et purpose, c’est la même chose, non ?

« Beaucoup d’entreprises remplacent maintenant le terme de mission par celui de purpose, mais ce n’est évidemment pas aussi simple que cela. Il faut se demander ce que l’on peut signifier pour les individus, la société et le monde.

C’est pourquoi je préfère parler de noble purpose. Un purpose tout court ne suffit plus. Hitler avait lui aussi un objectif très clair, mais on ne peut quand même pas qualifier celui-ci de noble… De même, l’ancienne entreprise énergétique Enron avait une mission bien définie, mais en ne respectant pas les valeurs qu’elle disait défendre, elle trompait le marché. Avec les conséquences que l’on sait…

Starbucks, en revanche, poursuit un noble purpose. Son fondateur Howard Schultz n’était pas mû par le désir de vendre le plus de café possible. Il voulait donner un nouvel élan à certains quartiers pauvres de Seattle, et c’est pourquoi la décoration des points de vente est si importante (tout comme le Wi-Fi gratuit). Les clients n’achètent pas du café, mais une expérience.

On peut en dire autant de l’entreprise belge Le Pain Quotidien. Son objectif n’est pas de devenir leader de marché, mais bien de convaincre les consommateurs que son "vrai" pain est de loin supérieur au pain industriel que la plupart d’entre nous mangent, et en même temps que l’on peut se régaler dans un cadre convivial et dans le respect des produits.

Quand j’entends une multinationale comme Mondelez affirmer que son but est de "mettre les en-cas à la portée de tous", cela me révolte. D’une part, beaucoup de gens sont obèses ; d’autre part, la faim règne dans de nombreuses régions du monde. Cette affirmation ne me semble pas du tout cadrer avec la philosophie du noble purpose. »

Deuxième question : un noble purpose permet-il vraiment de gagner de l’argent ?

« Cela ne fait pas le moindre doute ! Qui plus est, les entreprises qui sont réellement – et à tout moment – motivées par leur noble purpose sont plus performantes, ce qui se traduit par de meilleurs résultats financiers.

En soi, c’est logique : les gens considèrent comme un honneur de pouvoir travailler pour une entreprise qui n’est pas obsédée par des critères purement financiers, ce qui permet de recruter plus facilement des talents. Et, comme les collaborateurs sont plus motivés, ils font mieux leur travail et collaborent plus efficacement. Pas besoin de leur offrir toutes sortes de primes. Il n’est pas non plus nécessaire d’investir des montants exorbitants dans le marketing parce que l’entreprise rayonne naturellement ses valeurs et que toutes les parties prenantes se convertissent en ambassadeurs.

Pour de nombreuses entreprises, cela implique de passer d’une réflexion à court terme à une réflexion à long terme. C’est un point très important, surtout pour les sociétés cotées en Bourse. C’est pourquoi, dans mon livre, je recommande d’en discuter au préalable, notamment avec les analystes financiers. Il faut leur expliquer que l’on veut opter pour une autre stratégie, un changement qui pourrait avoir un impact sur les résultats pendant plusieurs trimestres, le temps de mettre en œuvre la transformation, mais qui est essentiel pour garantir la croissance à longtemps terme et surtout pour assumer réellement sa responsabilité sociétale. Les analyses seront certainement sensibles à ces arguments. »

Troisième question : qu’entendez-vous par les quatre dimensions que l’on trouve tant chez les hommes que dans les entreprises ?

« L’homme présente en effet quatre dimensions : le corps physique, le cerveau, le cœur (siège des émotions) et l’âme (la dimension spirituelle). On peut en dire autant d’une entreprise. La dimension physique, ce sont les infrastructures, les bâtiments et les usines. Le cerveau correspond aux connaissances et processus. Le cœur peut être associé aux relations entre les personnes de l’entreprise et le monde extérieur. Enfin, l’âme tient à la raison d’être de l’entreprise, son véritable ADN. Autrement dit, le noble purpose.

Comment les entreprises peuvent-elles exploiter pleinement ces quatre dimensions ? En partant en quête de leur raison d’être, qui doit servir de boussole pour les trois autres dimensions. Je donne toujours le conseil suivant aux entreprises qui existent depuis longtemps : retournez à vos débuts, à la pensée du fondateur. Quels étaient ses motifs ? »

 

A propos du rubrique "Le livre de marketing"

Chez BAM, nous mettons tout en œuvre pour inspirer nos membres. À cet effet, nous attirons régulièrement leur attention sur des ouvrages de marketing intéressants en leur proposant des critiques de livres, des comptes rendus de présentations, des synthèses de tables rondes, etc. À la fin de l’année, nos membres peuvent élire le Marketing Book of The Year parmi notre sélection.

 

A propos de cet article:

Date de Publication: 6 février 2020

Editeur: Bart Lombaerts